Je ne sais pas exactement ce que je dessine.
Je ne pense pas, je ne calcule pas.
Je laisse ma main gratter le papier, guidée par une douleur que je ne sais pas nommer.
Un visage sans bouche. Des chaînes. Un regard vide. Une silhouette recroquevillée dans un coin, comme moi, là, maintenant.
Je n’ose pas lever les yeux.
Mais je sens son regard sur moi.
Noah.
Il ne parle pas. Il ne me presse pas. Il attend.
Il voit ce que je ne dis pas.
Il s’approche un peu, toujours sans bruit. Puis, sa voix grave et calme glisse dans l’air :
— C’est toi, là ?
Je hoche la tête. L’ombre dans le coin, c’est moi.
Celle qui a oublié comment on crie, comment on demande de l’aide.
— Et l’autre ?
Je prends une grande inspiration. Mon cœur cogne trop fort.
Je murmure :
— Peut-être toi.
Il ne répond pas tout de suite. Et je suis soulagée.
Je ne veux pas de questions. Juste de la présence. Du silence qui ne fait pas mal.
— Tu dessines avec ta douleur, dit-il enfin.
Je hausse les épaules.
— C’est la seule chose que je peux faire. Les mots… ils sortent pas.
Il s’assoit à côté de moi, au sol, en tailleur. Pas trop près. Mais assez pour que je sente qu’il est là.
Sa présence ne me fait pas peur.
C’est étrange.
J’ai peur de tout, de tout le monde, des ombres dans le couloir, du moindre geste brusque.
Mais pas de lui.
— Et toi ? je demande, en osant enfin le regarder. T’en fais quoi, de ta douleur ?
Il sourit, un sourire triste. Pas un sourire de joie. Un sourire cassé.
— Je la garde. Je la laisse me consumer. Parfois je crois que je suis fait pour ça.
Je baisse les yeux. Je comprends. Trop bien.
— Moi, elle me serre le cœur, la poitrine. Elle m’étouffe.
— Tu fais des crises ?
Je hoche la tête.
— Parfois, je pense que je vais mourir. J’arrive plus à respirer. Mon corps tremble. Mes mains deviennent froides. Tout tourne.
Je ne sais pas pourquoi je lui dis ça. Peut-être parce qu’il ne me coupe pas. Peut-être parce que, dans ses yeux, je ne vois ni pitié, ni dégoût.
Juste… une forme de reconnaissance.
— Moi, c’est pas pareil, dit-il. Mais je connais ce genre de noirceur. Celle qui te serre la gorge. Celle qui t’enferme.
Il me tend doucement son carnet, puis un autre crayon, presque usé jusqu’à la moitié.
— Continue. Tu peux dessiner ce que tu veux. Même ta peur. Même ta colère.
Je prends le crayon. Cette fois, je dessine une clé.
Petite. Brisée. Mais là.
Au milieu des chaînes.
Il regarde. Il sourit à nouveau. Ce sourire discret, presque invisible.
— Tu sais ce que je vois ? me dit-il.
— Quoi ?
— Une fille qui croit qu’elle est morte à l’intérieur.
Mais qui cherche encore une issue.
C’est ça, la clé.
Je sens ma gorge se nouer. Mon cœur battre trop fort.
— T’as peur de moi ? me demande-t-il, tout bas.
Je secoue la tête.
— Non… pas de toi.
Un silence.
Puis sa voix, à peine un souffle :
— Moi non plus, Thaïs.
Et pour la première fois, dans cette pièce sans vie…
quelque chose respire à nouveau en moi.
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13 épisodes mis à jour
Comments
Majin Boo
Je suis fan de l'écriture de l'auteur, c'est si bien écrit 🌟
2025-06-22
3
Pretty flower girl
C'est bien/Hug//Hug//Hug//Hug//Kiss//Kiss//Kiss//Heart//Heart/ tu es trop forte que moi/Joyful/
2025-06-25
0
Pretty flower girl
Oui me laisse me dévoré/Frown//Smile/ Mais dans la vie il faut pas abonnés, il faut y croix/Smirk//Grin/ coûte que coûte, pas après pas
2025-06-25
1