Un nouveau départ

Le Japon était différent, mais en même temps, c’était chez lui. Jinrai le savait bien. Même après des années aux États-Unis, la terre de ses racines n’avait pas perdu son pouvoir. Mais aujourd’hui, c’était comme un retour dans un autre monde, un monde qui lui semblait étranger.

Tokyo ne changeait pas. Les rues bondées, les néons clignotants, l’effervescence. Mais lui, lui avait changé.

Il se leva tôt tous les matins. Il avait réservé une chambre dans un petit appartement près de son cabinet à Shibuya, un endroit calme, avec une vue sur les toits de la ville. Le contraste avec la vie à New York était frappant. Tout ici semblait plus intime, plus tranquille, même au cœur de la ville.

Le premier jour, il se rendit à son cabinet. Il avait décidé de rejoindre son ancien mentor, un avocat respecté avec qui il avait travaillé avant de partir pour les États-Unis. Ce serait son point de départ pour recommencer à zéro.

Mais ce n’était pas facile.

Le bureau était petit, mais bien organisé. Les dossiers, des montagnes de papiers, l’odeur du papier neuf et des archives. Une partie de lui avait du mal à se concentrer. Tout semblait trop figé. Trop… ordonné.

Il passa la matinée à examiner des dossiers, signant ici et là, rendant des avis juridiques, toujours aussi précis, toujours aussi froid. Mais son esprit, lui, n’était pas dans ce travail. Il pensait à Evana. Pas constamment, mais par vagues. De petites pensées fugaces. Elle était là, dans l’ombre de ses souvenirs.

Après une pause déjeuner rapide, il se rendit dans un parc proche pour une promenade. Il avait besoin de cette pause, de ce moment seul, pour se vider la tête.

Le soleil se couchait lentement derrière les immeubles de la ville, teignant le ciel de teintes orange et roses. Il s’arrêta devant une fontaine, les yeux fixés sur l’eau qui s’écoulait en douceur. Ses pensées se tournèrent vers Ayumi. Le divorce était désormais officialisé. Son esprit restait occupé par l’idée de ce qu’il avait perdu, de ce qu’il n’aurait jamais pu avoir.

Il était seul, mais il n’en était pas triste. Pas encore.

Le soir, il dîna dans un restaurant isolé, un endroit qu’il fréquentait dans sa jeunesse, avant que sa vie ne bascule. Le serveur le salua d’un léger sourire. Jinrai répondit par un hochement de tête.

Les plats étaient simples : du poisson frais, du riz, des légumes. La simplicité de la cuisine n’était qu’un reflet de son état d’esprit : minimaliste, presque effacé.

Il paya la note, se leva et sortit. Dans la rue, la vie continuait autour de lui. Les gens se croisaient, pressés, distraits par leurs téléphones ou leurs pensées. Jinrai se retrouva une nouvelle fois seul au milieu de cette foule.

Le lendemain, il retourna au cabinet. Il savait que son retour au Japon ne serait pas facile, mais il n’était pas encore prêt à se laisser emporter par ses pensées. Il devait avancer. Trouver un but. Mais celui-ci semblait encore flou, lointain.

Alors qu’il s’apprêtait à consulter un nouveau dossier, son téléphone vibra. Un message. Il hésita un moment avant de l’ouvrir.

C’était de Anna.

Jinrai, il faut que tu saches… Evana a reçu ton message. Elle t’a répondu.

Le cœur de Jinrai s’accéléra. Mais il n’ouvrit pas la réponse tout de suite. Il savait qu’il n’était pas encore prêt à lire ce qu’elle avait écrit. Pas ici, pas maintenant.

Mais il savait aussi une chose : malgré la distance, malgré l’océan entre eux, il ne pouvait pas la faire disparaître de son esprit. Elle était là, tout de même. En silence. Dans un coin de sa tête.