Chapitre 8 : Héritiers de la nuit

Le passé ne meurt jamais vraiment. Il hante les esprits, se cache dans les ombres des souvenirs, prêt à ressurgir au moment le plus inattendu. Donateli le savait mieux que quiconque.

Les flashbacks s’enchaînaient encore dans son esprit. Luca, son frère assassiné. Son père, Donateli Caruso Moretti, qui lui avait tout appris sur le pouvoir et la peur. Sa mère, Alessandra Donati, dont le parfum et la voix douce lui manquaient encore.

Et puis, il y avait Esperanza.

Leurs vies avaient été tracées avant même leur naissance. Deux enfants issus des plus grandes lignées criminelles d’Italie. Deux âmes trop sauvages pour être enfermées dans les codes rigides de leurs familles.

Mais ils n’avaient jamais vraiment eu le choix.

— Un jour, tout cela sera à vous, avait dit Salvatore Vincenzo, le père d’Esperanza.

Ce jour était venu bien trop vite.

*Le feu et la cendre*

L’attaque contre la famille Vincenzo avait été une boucherie. Une trahison orchestrée de l’intérieur. Esperanza n’avait eu que quelques minutes pour fuir avant que le manoir ne soit réduit en cendres.

Donateli se souvenait encore du moment où il l’avait retrouvée, recroquevillée derrière un entrepôt, ses vêtements tachés de sang.

— Il est mort. Ils l’ont tué.

Sa voix avait été brisée, mais ses yeux… ses yeux étaient devenus ceux d’une femme qui ne pardonnerait jamais.

Ce soir-là, elle lui avait appartenu. Non par obligation, ni par faiblesse, mais parce qu’ils étaient les seuls capables de comprendre cette douleur, ce vide qui rongeait leurs âmes.

Dans une chambre d’hôtel miteuse, ils avaient mêlé leur rage et leur désir, leurs corps cherchant un exutoire à la perte et au chaos.

— Tu es à moi, Alessandro.

Son vrai prénom, soufflé contre sa peau brûlante.

— Et toi à moi.

Depuis cette nuit-là, ils avaient fait de la vengeance un serment.

Retour au présent – En cavale

Un bruit soudain fit sursauter Donateli. Il ouvrit les yeux. L’eau salée, le vent, le moteur du bateau.

Ils n’étaient plus dans le passé. Ils fuyaient.

Lorenzo avait voulu les écraser. Il avait échoué.

Fabio, concentré sur la navigation, jetait des coups d’œil nerveux derrière eux.

— On a de l’avance, mais pas pour longtemps.

Esperanza s’adossa au rebord, observant l’horizon. Elle était magnifique, même après un combat. Ses cheveux en bataille, une coupure fine sur sa joue, son regard noir de détermination.

— On va où, capo ? demanda Fabio.

Donateli inspira profondément. Ils ne pouvaient pas retourner à Naples. Lorenzo avait trop d’hommes, trop de contacts.

— On va disparaître quelques jours. J’ai une planque à Amalfi.

— Amalfi ? grimaça Fabio. C’est un peu trop touristique, non ?

— Justement. Ils nous chercheront dans les endroits sombres, pas là où les touristes boivent du vin en terrasse.

Esperanza esquissa un sourire approbateur.

— Intelligent. J’aime ça.

Fabio secoua la tête en soupirant.

— Et après ?

Donateli se tourna vers lui, son regard plus froid que jamais.

— Après, on revient.

Son ton ne laissait place à aucun doute.